1975, les Headhunters sortent de l'ombre du gourou pour dévaster nos oreilles avec leur premier album studio. Produit par Herbie Hancock et son producteur de l'époque David Rubinson, Survival Of The Fittest a été fatalement enregistré aux Wally Heider Studios de San Francisco. Direction ou non de la production, il en résulte un album sans concession, d'une expression forte et personnelle d'un collectif à l'identité musicale propre et au groove unique. Un album assez difficile d'accès, si vous y rentrez vous succomberez aux chasseurs de tête mais attention au retour à la réalité. Survival Of The Fittest est une pépite et ce n'est pas pour le mythe! Sans mite et plein de rites, il empêche la méningite mais favorise la collectionnite
Arista a sorti un repress LP correct il y a quelques années. Je ne sais pas ce que vaut l'original.
Notons aussi la 6 cordes qui remplace le clavier, un soin laissé à Blackbird McKnight qui s'en sort bien mieux que sur Flood.
Titres
A1 God Make Me Funky 9:35
chant : Paul Jackson
chant : Pointer Sisters
A2 Mugic 3:31
arrangements : Zak Diouf
A3 Here And Now 7:07
flûte : Joyce Jackson
B1 Daffy's Dance 6:05
B2 Rima 8:14
flûte alto : Joyce Jackson
B3 If You've Got It, You'll Get It 6:26
Crédits
Bill Summers : djembé, cloches, cloches (traineau), guiro, maracas, balafon, tambourin, bongos, caxixi, shekere, agogô, berimbau, pandeiro, congas, cabasa, marimbula, gong [Balinais], percussions [Log Drum, quica, gankoqui, hindewhu], chant
Mike Clark : batterie, chant
Paul Jackson : basse
Blackbird McKnight : guitare, chant
Harvey Mason : percussions
Bennie Maupin : saxello, clarinette basse, saxophone ténor, piano [acoustique], chant
Baba Duru : grose caisse, cloches, percussions
Zak Diouf : djembé
Producteur : David Rubinson & Friends, Inc., Herbie Hancock
Le verso de la cover présente les musiciens. Présentation reprise et traduite
dans le livret de l'édition CD française de 2001 des séries RCA Victor chez Arista.
Classique parmi les classiques, véritable hymne à lui tout seul, God Make Me Funky représente les Headunters dans la mémoire collective. Et pour cause! Une longue introduction typiquement funk-hancockienne commence ce long périple de près de 10 min. Les percussions ornent (pour le moment) ce beat de batterie simple et si efficace (less is more!), la guitare met son grain de sel et cette ligne de basse débarque... à faire trembler les murs de Jéricho! Une voix chaude se fait entendre, Paul Jackson en personne aidé ponctuellement des Pointer Sisters. Vers 3'30", tout s'excite et Bennie Maupin communique à son tour avec le Tout-Puissant. Même si elle est là comme filet de sécurité, nul besoin de l'assise rythmique pour emmener les envolées de Maupin au Ciel. La fièvre monte, les frottements excitent la navette Headhunters lors de sa sortie de l'atmosphère, elle tient le cap mais nous? Il faut s'accrocher pour ne pas être largués et le seul moyen pour les plus "faibles" est de se tenir à la basse métronomique qui ne bouge pas d'un poil avec sa ritournelle lourde et paraissant être le seul lien restant avec la zone terrestre. Face à l'être Suprême, les voix humaines assènent le coup de grâce et la prière de l'équipage se trouve exaucée (m'enfin z'avaient pas besoin de ça, c'était déjà dans leurs gènes )
A présent flottant dans l'espace intersidéral, Mugic est le moment calme après la tempête. Une africanité insufflée par l'ethnomusicologue Bill Summers où percussions nombreuses et chants cérémonieux nous rappellent le danger permanent de ce territoire inconnu. En milieu de morceau, le fait est là, nous ne sommes rien, une pluie d'astéroïdes rend le voyage périlleux, la basse change de fonction et alerte tout le monde en mettant les voyants au rouge et tout disparaît comme c'est venu, en un rien de temps.
On aurait bien vu un clavier pour l'introduction de Here And Now mais guitare/flûte/basse sont d'un plus bel effet. Wow, basse enclenchée, percussions dans les starting-blocks, guitare au taquet, Maupin peut s'essayer au dialogue avec une civilisation inconnue mais c'est sans compter sur ses acolytes pour le prendre au mot et ça se termine en un débat engagé, endiablé entre eux tous, avec une vitesse toujours plus croissante de la navette. Mach1 Mach2 Mach3, on ne sait plus très bien et on est transportés, collés au siège, acceptant les jets non sans difficulté. Le fade out du God calme tout le monde, visiblement les Headhunters ne décident pas là-haut!
Voilà donc pour eux un moment fun, Daffy's Dance est le répit pour s'éclater et pour envoyer leur funk bien à eux. Capitaine désigné à l'embarquement, Paul Jackson lâche son riff avec McKnight et son ami télépathe lui emboîte le pas derrière ses fûts ; les réacteurs en puissance de Mike Clark. Et on danse, Maupin fait le mariole, les percussions sont décontenancées par la naïveté de leurs partenaires. Un peu avant le milieu du morceau, tout le monde s'enflamme et la guitare parle toute seule, elle n'est pas contente et le fait savoir. De grands enfants, ils sont intelligents et pensent au retour chez eux. Rima est l'occasion pour eux de reprendre des forces et de se mettre en phase avec l'environnement qui les entoure pour pouvoir affronter la phase critique qui les attend. Ethéré et aérien, on se remet de ses émotions avant le moment crucial.
If You've Got It, You'll Get It termine la croisière au moyen d'un funk montant en intensité, d'un solo guitare au son rock comme pour montrer leur force et leur envie pour réussir le retour au bercail et ce, sans encombre. Çà passe tout seul et l'atterrissage prouve que les Headhunters nous emmènent où bon leur semble en prenant soin de nous et en nous ramenant sains et saufs de leurs explorations.
Bon je sais pas trop pourquoi je suis parti dans un univers spatial, allez savoir! D' autant que cet album m'a toujours paru être un environnement de jungle et qu'avec un tel titre et le nom du groupe, cela s'y aurait peut-être mieux prêté! La chronique est venue au fil du clavier, on ne la refera pas et on gardera cette spontanéité, bonne ou mauvaise.